L’art de l’émail chez Piaget
« L’émail est devenu la fontaine de jouvence
des créations Piaget. »
La Cote des Montres™ le 22 août 2008
Un art millénaire
Lointain cousin du cristal, l’émail plonge ses racines sur les rives chaudes de la mer Méditerranée. Dès l’Antiquité, il embellit bijoux et parures avant de se diffuser dans toute l’Europe. Utilisé d’abord dans l’orfèvrerie et la joaillerie, les horlogers y recourent dès le XVe siècle. Dès lors, les artisans affineront perpétuellement leurs techniques jusqu’à en tirer quatre différentes. Champlevé, cloisonné, flinqué et miniature deviennent ainsi quatre façons de jouer avec cette matière sur laquelle le temps n’a aucune prise.
A Genève, les artisans locaux se muent au fil du temps en spécialistes de cette technique qu’ils utilisent pour décorer les cadrans et les boîtiers des montres qu’on leur soumet. Consciente de la valeur de ce patrimoine, la Manufacture de Haute Horlogerie Piaget a décidé de redonner ses lettres de noblesse à l’émail dont la présence sur des pièces d’horlogerie était devenue quasi confidentielle au cours du siècle dernier. Comme le confirme son CEO Philippe Léopold Metzger : « L’émail est devenu la fontaine de jouvence des créations Piaget. » C’est pourquoi la manufacture crée des pièces uniques ou en séries limitées dévoilant un degré de beauté et de raffinement que seul l’émail permet d’atteindre. Après avoir été précurseur dans la maîtrise des mouvements mécaniques extra-plats et démontré ses compétences techniques au travers de réalisations marquantes – à l’instar du Tourbillon relatif - Piaget renforce désormais aussi sa maîtrise des métiers d’art.

De la poudre concassée aux scintillements…
La matière émail est une composition de verre à laquelle sont ajoutés des oxydes métalliques en guise de colorants. La gamme infinie de couleurs et de nuances d’émaux résulte des divers oxydes pouvant être associés à l’émail et de leur combinaison entre eux. Par rapport aux émaux « classiques », la particularité des émaux « grand feu », tels ceux réalisés par Piaget, réside dans le fait qu’ils atteignent leur point de fusion à une température nettement plus élevée, soit entre 820°C et 850°C. Cette technique leur confère une pureté exceptionnelle et garantit la longévité éternelle des pièces.
L’émail brut se présente en morceaux ou en poudre grossière. Lors de la préparation, la matière est broyée dans un mortier jusqu’à obtenir une poudre très fine, laquelle est ensuite longuement rincée. Les émaux ainsi nettoyés et prêts à l’usage sont stockés dans de l’eau distillée.
L’émail se dépose toujours sur une matrice en métal et seuls le cuivre, l’argent et l’or affichent les qualités nécessaires à cet usage. La Maison Piaget, toujours à la recherche de l’excellence, utilise uniquement l’or sur l’ensemble de ses créations. Suivant l’épaisseur de la pièce métallique, cette dernière devra être contre-émaillée. Le contre-émail a une importance considérable car il maintient le support en fusion de manière à ce qu’il ne bombe pas, ni ne se creuse. L’émailleur peut ensuite appliquer l’émail à l’aide d’un fin pinceau et de colle végétale et le laisser sécher avant de procéder à la cuisson.

L’expression « grand feu » prend ici tout son sens. Pour figer la matière sur la matrice, cette dernière est passée dans un four pour une durée oscillant entre 40 et 60 secondes. L’émail se réduisant en cuisant, il faudra plusieurs passages pour obtenir une belle intensité de couleur et faire en sorte que toutes les anfractuosités soient remplies. Cette étape occupe une place cruciale dans le processus : à ce moment-là peuvent apparaître des micro-fissures réduisant à néant le travail de l’artisan et l’obligeant à recommencer entièrement son ouvrage.
A l’issue du premier passage au feu, l’émail déborde ; aussi est-il indispensable d’égaliser toute la surface avec une pierre d’émeri et de l’eau. Cette étape de lapidage égalise la surface de l’émail mais le rend néanmoins mat. Il faudra donc passer la pièce une dernière fois au four pour lui rendre sa brillance, une opération intitulée « feu de glaçage. »